Ce poème raconte l’histoire du chevalier Philippe Merle de Xaintrie et de son destrier Vespéral, en ancrant le récit dans des lieux spécifiques comme Corrèze, Ventadour, et Serilhac. L’inspiration stylistique provient des œuvres de troubadours comme Bertran de Born, ajoutant une tonalité nostalgique et héroïque. Ce noble seigneur avait certainement une oreille attentive aux artistes de passage et si ses vers sont plus maladroits, ils témoignent d'une sensibilité bien propre à son temps.
Philippe est le cousin germain d'Ebles IV de Ventadour, et l'accompagna au secours de Marseille. Sa famille tenait (avec d'autres co-seigneurs) la Tour de Merle qu'on visite encore aujourd'hui sur la commune de Saint Geniez ô Merle.
La Lamentation de Philippe de Corrèze
De Corrèze suis un seigneur,
Philippe, vassal sans grand honneur.
Mon oncle, Hugo du Roc-Tourné,
M'offrit un poulain d’illustre lignée.
Sur mes terres, près du Ventadour,
Je l’élevai dès son jeune jour.
Auprès des bois et des prairies,
Je fis l'apprendre aux galanteries.
Vingt ans passèrent, durs et bénis,
Des liens forgés par Dieu et vies.
Nommé Vespéral, fier destrier,
Il fut mon guide et mon allié.
L’an douze cents, sous Marseille ardente,
En guerre contre la flamme catalane,
Mon fidèle ami, brave et savant,
M’épargna l’embuscade sanglante.
Loin des ronces, des pieux cachés,
Il me mena, léger et pressé.
Je perdis rênes, étriers, honneur,
Mais non ma foi en ce sauveur.
D’une course sûre, il me porta,
Vers un bois sombre, il s’écarta.
Sous l’ombre douce, il s’arrêta,
M’offrant le temps que je m’arma.
Ainsi fortifié, je revins au jour,
Et triomphai de l’ennemi lourd.
Par lui je vécus, par lui j’aimai,
Et aux noces je le couronnai.
Ma dame Blanche, de Serilhac,
Au soir me vit rentrer intact.
Il partagea la vie et l'ardeur,
De mon fief, de mes jours sans terreur.
Mais hélas ! Sous le grand chêne noir,
Vespéral s’éteint, ce soir.
Vingt-trois hivers ont courbé sa croupe,
Sa flamme éteinte, mon cœur s’estompe.
Adieu, destrier d'étoffe et d'or,
Jamais je ne guérirai encore.
Au Ventadour, ton nom gravé,
Dans mon cœur reste à tout jamais.