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HK 59 Titoff le Mystérieux

tranché d'argent et de gueules à la croix latine de l'un en l'autre.

Une enluminure de Saint Victor montre un cavalier portant ce blason au milieu d'autres chevaliers défendant Marseille. Il pourrait être le Miles Titofus dont il est fait référence dans le texte, mais là non plus, aucune précision n'apparaît.

 C'est finalement d'un humble héraldiste rhénan qu'est venu la solution.  Kristof Thurau, petit cousin de Dietrich, le fameux coureur cycliste qui porta le maillot jaune en 1977. Herr Thurau cherche dans les bibliothèques de Francfort sur le Main de quoi reconstituer un armorial médiéval de la Rhénanie.

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Il aime passer ses vacances dans le Gard Rhodanien, et je tombais sur lui à la terrasse d'un délicieux salon de thé de Laudun, le Mas des Moumounes, lisant un livre rempli d'illustrations de blasons médiévaux tout en dégustant les délicieuses pâtisseries de la Maison Poulain. Il avait choisi une tarte aux fraises (nous étions en Mai) et son compagnon dégustait le petit coeur, l'une des spécialités de Mehdi Poulain. (pâte sablée, crème au mascarpone et aux amandes, coulis de cerises)

27972337_1985222608386398_1827226481624131405_n.jpg M'excusant de le déranger, je le saluais, en lui disant que j'étais moi même passionné d'héraldique et lui demandait ce qu'il lisait.
C'était un fac similé du Codex Manesse, un manuscrit de poésie lyrique enluminé ayant la forme d'un codex. Il est le plus grand et somptueux des recueils du Minnesang allemand.
Les Minnesanger étant les équivalents germaniques de nos troubadours et trouvères étaient parfois, comme leurs équivalents français ou provençaux des chevalier de haut rang, et leurs armoiries sont délicieusement illustrées dans le manuscrit. Parmi eux, il y a même l'Empereur Henry VI, fameux poète lui-même.
Après de longues minutes de conversation moitié en anglais, moitié en français, quelques mots d'allemands traduits par nos conjoints, je l'invitais à prendre l'apéritif à la maison, découvrir ma bibliothèque et ma collection de miniatures.
C'est ainsi qu'Herr Thurau découvrit le blason, pour moi encore non identifié que j'avais intitulé Titoff le Mystérieux.
La solution, il la détenait depuis des années. En effet, l'université de Francfort l'avait appelé en 2012, pour identifier des armoiries découvertes sur un palimpseste du  XIIIème siècle qu'ils tentaient de restaurer après que le manuscrit ait été réutilisé en livre de prières au XVème siècle.

Une enluminure présentait un chevalier vêtu de bleu pastel et portant les fameuses armoiries d'argent et de gueules à la croix latine de l'un en l'autre !
Grâce aux indications du texte, Krstof attribua ces armoiries au ministerialis Karl von Missenbach.

0273_af__7069680056578080768_o.jpgSi à l'origine (carolingienne), les ministerialis étaient des soldats n'ayant pas le statut d'homme libre, leur position sociale à la fin du 12ème siècle , et surtout pour les ministerialis casati (disposant donc d'un fief) n'a rien à envier à celle des autres vassaux.

Missenbach est un petit fief de la principauté ecclésiastique de Trèves, détenu par une branche collatérale de la famille, liée aux chevaliers hospitaliers. La branche s'éteignit au 13ème siècle et le fief fut repris par la branche ainée.
Quant à Karl, bien qu'il ne subsiste aucun texte de lui, on sait qu'il fut aussi un Minnesanger, ami de
Wolfram von Eschenbach, et probablement aussi un agent d'Henry VI.

Que faisait il donc à Marseille? Il aurait pu loger à la Commanderie du Fort Saint-Jean, puisqu'il était lié aux Hospitaliers. On ne peut qu'imaginer qu'Henry VI l'avait evoyé là pour observer le développement des événements. En effet, la Provence restait Terre d'Empire et la main mise d'un souverain étranger (le Roi d'Aragon) même s'il en avait accepté l'hommage, pouvait l'inquiéter.

Quelques années plus tard, un retrouve un mystérieux Carolus, envoyé de l'Empereur, rencontrant Archambaud II comte du Périgord en 1212, après ce qui semble avoir été une crise dynastique dans le Comté, alors vassal du Roi de France, entre deux périodes de domination anglaise.

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